La Précarité comme être sans. Sens anthropologique et phénoménologie clinique de la situation précaire. Avec quoi se fait une vie d’homme et comment se défait-elle ? Tels de nouveaux Cavaliers de l’Apocalypse surgis du fond des âges pour assaillir notre hypermodernité performante, la précarité, le chômage, l’exclusion, l’exil envahissent notre société, notre quotidien, nos rues. De plus en plus d’hommes sont désignés par ce qui leur manque, les sans abri, sans travail, sans droit, sans papier, sans terre, etc., et assignés à une identité réduite à la perte, à la privation, au dénuement, au rien. Le lien social qui fonde, maintient et garantit notre humanité, perd pour eux sa naturalité première pour devenir précaire, c’est-à-dire objet de prière, incertain, révocable et révoqué. A notre commune vulnérabilité ontologique à laquelle le social ne répond plus s’ajoute pour eux la précarité socialement construite, qui produit la perte d’autonomie, une pathologie de la confiance en l’Autre, la désubjectivation du syndrome d’auto-exclusion qui confine à la disparition de soi et finalement la mutilation de leur humanité. Le précaire, le chômeur, le SDF, l’exilé devient les surnuméraires, les invisibles sociaux, hommes des marges, hors jeux, sans voix et sans parole dans le concert démocratique, contingents, inutiles, illégitimes, sans prise sur leur vie, privés d’avenir, d’intimité, d’histoire, de quotidien. Réduits à seule la nécessité, sans pouvoir déployer leur existence ni réaliser une œuvre, ils survivent -mais ne devrait-on pas dire sousvivent ?- à la violence sans nom de la guerre économique dans les interstices de la société, déchus devenus déchets, jusqu’à perdre parfois leur nom, leur verticalité anthropologique et leur ultime dignité. Les psychologues, psychiatres, psychanalystes, philosophes ici rassemblés interrogent la souffrance existentielle spécifique du précaire, véritable visage social de la folie qui s’échoue en souffrance dépassée - comme on dit un coma dépassé - qui parfois ne peut plus se penser ni se dire. Son sens anthropologique se précise comme l’altération du vivre ensemble fondateur, la destruction de la communauté et le déchirement de l’entremêlement ontologique du sujet et du monde social. Chacun d’eux témoigne à sa façon de rencontres qui les ont transformés parce qu’ils se sont ouverts un temps à l’ultime dénuement de ces êtres sans, au cœur de la commune précarité des hommes, sans y sombrer pourtant. Ils peuvent alors attester de situations qu’on ne peut plus se contenter de contempler depuis sa tour d’ivoire scientifique car il en va précisément de notre humanité à tous.
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MÉLANCOLIE, Phénoménologie, Psychopathologie, Psychanalyse. Que ce soit du côté de la psychanalyse et de ses commentaires de Deuil et Mélancolie (1917) ou du côté de la psychiatrie phénoménologique, et on pense notamment au livre de Binswanger Manie et Mélancolie (1960), la mélancolie a suscité tout au long du vingtième siècle de très nombreuses publications. Mais un ouvrage, contemporain de ce dernier, se distingue par son ampleur et sa profondeur et mérite une attention toute particulière : Hubertus Tellenbach publie en 1961 Melancholie : Problemgeschichte, Endogenität, Typologie, Pathogenesz, Klinik, ouvrage qui sera traduit quelques années plus tard sous le titre La Mélancolie. Comme Karl Jaspers, l'auteur est un psychiatre philosophe ou, comme on voudra, philosophe psychiatre. Il mobilise son immense culture afin de jeter quelques lueurs sur ce trouble étrange, qui suscitait déjà l'étonnement des grecs et qui frappe encore aujourd'hui certains de nos contemporains. Tout le monde en effet ne semble pas pouvoir sombrer, au sens médical du terme, dans la mélancolie. Reste alors à comprendre dans quelles circonstances certains le deviennent, ce que recouvre la notion de typus melancolicus, mais aussi à cerner la souffrance mélancolique. Telle est l'ambition de ce livre qui envisage la mélancolie d'un point de vue aussi bien historique que phénoménologique, psychiatrique et psychanalytique. Editions Le Cercle Herméneutique, 2015. |
CLINIQUE DU LEBENSWELT : Psychothérapie et psychopathologie phénoménologiques. A.Tatossian, V.Moreira, J. Chamond et al. Prendre en compte le monde vécu du patient, partager son monde devenu notre monde et l'y accompagner dans l'aventure psychothérapique à partir d'une herméneutique de la clinique du Lebenswelt prend le sens d'une véritable éthique d'être avec l'autre. MJW Fédition, 2016. |
Les styles temporels pathologiques. Etudes psychanalytiques, existentielles et phénoménologiques de la temporalité dans les névroses et les psychoses. Jeanine Chamond Le style temporel pourrait être la façon dont on inscrit sa continuité psychique dans la discontinuité de son surgissement, chaque fois en présence singulière. Articuler son passé à son présent pour accueillir l'arrivée du temps est l'art de conjuguer les paradoxes de la temporalité relevés par l’anthropologie, la religion la philosophie, la psychologie et la psychanalyse. Les temporalités névrotiques témoignent que les symptômes enkystés dans le passé ne permettent pas de s'ouvrir à l'arrivée du temps : le paraître hystérique qui paralyse sa présence, le retrait de obsessionnel qui le rend spectateur de sa vie, le court-circuit phobique au contact de l'horreur sont des manières de rater sa temporalisation. Les psychoses sont une défaillance ontologique à être son temps dans le temps du monde, comme en témoignent le néant mélancolique, l'éclatement maniaque, la pétrification paranoïaque et les catachronies schizophréniques. Gageons que ces figures de l'échec à être et à devenir son temps nous aiderons à trouver notre propre style temporel et notre concordance des temps entre le temps qui passe, le temps qu'il fait dans notre être et le temps qui fuse de notre présence au monde. Éditions Universitaires Européennes, 2016. |
Dernière mise à jour : 27/02/2018